DE ROCHEBRUNE Renaud
Le cinéaste ivoirien est décédé le 18 avril à Paris. Il ne nous fera plus rire et sourire devant le grand écran. Et nous ne verrons plus ses yeux malicieux derrière ses grandes lunettes hors de mode, sous un front largement dégarni. Le réalisateur de l’inoubliable comédie Bal poussière, restée jusqu’à ce jour le plus grand succès public du cinéma africain, ne réalisera pas les projets dont il nous entretenait encore avec passion il y a quelques mois. Mort dans un hôpital parisien au matin du 18 avril, Henri Duparc, dont les ennuis de santé n’avaient pas altéré l’optimisme foncier, nous a quittés alors qu’il était loin d’avoir terminé son beau parcours de fidèle serviteur du septième art. Aimé du public, ce réalisateur éminemment sympathique, profondément humaniste, observateur pointu des petites choses de la vie quotidienne comme des faits de société, n’a jamais été reconnu par ses pairs comme il l’aurait mérité. S’il a glané quantité de prix, il n’a en particulier jamais été couronné par le Fespaco ou célébré à Cannes. Sans doute doit-il cette relative mise à l’écart à son choix de miser toujours sur l’humour, la légèreté, la dérision. Sans jamais formater ses films pour complaire à ceux qui préfèrent qu’on parle toujours avec gravité de l’Afrique et de ses problèmes. Voilà pourquoi, et cela vaut bien tous les parchemins officiels, lui seul pouvait se vanter d’avoir reçu sa plus grande récompense non pas des puissants mais de la rue. Au sens propre, puisque le succès de Rue Princesse - qui évoque plaisamment la prostitution et l’hypocrisie qui l’accompagne - fut tel à Abidjan en 1993 que le titre du film a donné ensuite son nom à l’artère réputée la plus chaude de la ville. …Henri Duparc entend rester un réalisateur africain qui tourne sur le continent des histoires africaines pour les populations locales. … Il privilégiera aussi sur la fin de sa vie les partenariats Sud-Sud, par exemple avec le Maroc et l’Afrique du Sud, pour finaliser ses deux dernières œuvres de fiction, Une couleur café (1997) et Caramel (2005). Tout en préparant une adaptation très personnelle d’une pièce de Feydeau (La Puce à l’oreille) ainsi qu’une nouvelle comédie dont il avait déjà écrit le scénario (La Grève du lit), Henri Duparc s’était lancé dans un grand projet pour la télévision : une série de documentaires consacrés aux hommes politiques africains qui ont été à l’origine d’un changement significatif dans leur pays. Le premier évoquait le parcours d’opposant de Laurent Gbagbo (La Force d’un destin). …